Couvrir le sol en contexte méditerranéen

Implanter un couvert végétal permet de couvrir le sol pendant une période plus ou moins longue. Les couverts végétaux offrent de nombreux services écosystémiques comme la protection contre l’érosion et la battance, l’amélioration de l’état structural des sols, la lutte contre les adventices ou parasites, le stockage du carbone, l’enrichissement des systèmes en azote et matière organique… Cette pratique est adoptée par de nombreux agriculteurs mais le contexte méditerranéen complique l’implantation et la gestion des couverts, particulièrement en agriculture biologique.

Les spécificités de la région SUD-PACA

La région SUD-Provence-Alpes-Côte d’Azur se différencie par ses climats : 

  • Un climat montagnard sur les plateaux et monts de Vaucluse, montagne de Lure, Gapençais et Préalpes de Digne et Castellane, avec des précipitations annuelles moyennes de 800-1150 mm/an ;
  • Un climat alpin sur le haut Verdon, haute Bléone et l’Ubaye, le Champsaur et le Dévoluy, caractérisé par des froids précoces et des précipitations annuelles moyennes de l’ordre de 700-1200 mm/an (CA, 2019) ;
  • Un climat méditerranéen dominant dans la moitié sud de la région.

Le climat méditerannéen se définit par de fortes variations de température au cours de l’année et de fortes sécheresses estivales, avec une faible pluviométrie annuelle (autour de 600-650 mm/an) inégalement répartie pendant l’année (GREC SUD, 2016). La majorité de la pluviométrie est concentrée à deux moments : au printemps et en automne. Ces pluies d’automne peuvent être très violentes, pouvant ainsi engendrer des risques d’érosion et de glissement de terrain dans les zones sensibles. La fin d’hiver et le début du printemps sont généralement moins humides et les précipitations après le mois de mai sont plutôt faibles. Ces phénomènes ont tendance à s’accentuer ces dernières années : une recrudescence des pluies automnales et une diminution des pluies printanières et estivales.

L’absence de pluie en été et les fréquentes sécheresses compliquent le semis et le développement des couverts végétaux en région méditerranéenne. Le défi est d’adopter les meilleures stratégies (par exemple, avoir recours à l’irrigation) et de saisir des créneaux optimaux pour implanter les couverts (semer plus tôt ou  plus tard). Ainsi, il est essentiel de créer des références sur les couverts végétaux, leur réussite et leur destruction sans herbicide, dans un tel contexte climatique.

Les services agronomiques des couverts végétaux

Fertilité physique, chimique et organique

Fertilité physique : les racines du couvert végétal ont un effet structurant sur le sol. Cet effet varie selon le système racinaire des espèces implantées : pivotant (racines épaisses et verticales), fasciculé (chevelu racinaire dense). De plus, la matière organique issue de ce couvert améliore la structure du sol par sa fixation avec les éléments minéraux (argiles notamment). L’amélioration de la structure du sol se traduit par une amélioration de sa porosité, permettant une hausse de la réserve hydrique, donc une meilleure rétention en eau.

Fertilité chimique : le couvert végétal a la capacité de prélever dans le sol des éléments fertilisants et de les restituer à la culture suivante, ainsi que de stocker du carbone.

Fertilité biologique : la matière organique apportée par le couvert végétal est la nourriture de la vie du sol. Elle favorise sa quantité, sa diversité et son activité. L’amélioration de l’activité des macro et micro-organismes du sol permet une meilleure fertilité chimique grâce à l’augmentation de la minéralisation des éléments nutritifs présents dans le sol. De plus, cette activité biologique permet une meilleure fertilité physique puisqu’elle améliore directement la structure du sol : galeries des vers de terre, mucus, etc.

Erosion

La couverture des sols permet de les protéger des phénomènes d’érosion, particulièrement dévastateurs sur les sols battants. Il y a des effets physiques contre l’érosion : le couvert retient les mottes de terres grâce à son son système racinaire, l’ombre du couvert protège le sol des effets desséchants du soleil ; mais aussi organiques  : la vie du sol crée une colle organique formant des agrégats résistants à l’érosion hydrique et éolienne. Les phénomènes d’érosion sont accrus lors d’événements climatiques exceptionnels, dont la fréquence tend à augmenter en contexte méditerranéen : pluies importantes, inondations, sécheresse, etc.

Piège à nitrate et carbone

Les couverts végétaux d’interculture (entre la moisson d’une culture d’été et le semis d’une culture de printemps) sont déjà imposés dans certaines régions, dans le cadre de la Directive Nitrate. Ils ont alors pour but de piéger les nitrates excédentaires dans les sols (notamment dans des cas de surfertilisation et/ou de risques de lessivage de l’azote importé par les pluies), afin d’éviter une pollution des ressources en eau. Implanter des couverts permet donc de (re)mobiliser les éléments nutritifs présents dans le sol.

Aussi, les couverts contribuent au stockage de carbone dans les sols. Les couverts sont de la matière organique, elle-même étant essentiellement constituée de carbone (on considère que la matière organique est composée à 58% de carbone). Son stockage dans les sols atténue le changement climatique.

Les travaux d’Arvalis-Institut du Végétal indiquent qu’1 tonne de MS/ha de couvert végétal enfouie dans le sol restitue à ce dernier environ 400 kg/ha de carbone. Compte-tenu du coefficient d’humification de 28 % communément admis, cela signifie que 112 kg/ha de carbone sont stockés durablement.

Régulation des pluies

Le cycle de l’eau est principalement dicté par l’évaporation et l’évapotranspiration. On estime que 60 à 70 % de l’eau des pluies d’été ne proviennent pas de la mer, mais d’une évaporation/transpiration végétale en amont. Il y a un donc un enjeu majeur à maintenir cette eau localement et limiter son évacuation vers les mers et les océans. Les couverts végétaux permettent justement ce ralentissement du retour de l’eau vers la mer par l’évapo-transpiration, un meilleur rechargement des nappes, une régulation des rivières et un refroidissement local en été. Systématiser les couverts végétaux un maximum de temps dans l’année est un moyen considérable de limiter la sécheresse en été et les pluies torrentielles en hiver.

Enfin, l’activité photosynthétique des couverts va capturer du carbone atmosphérique, tout en rejetant de l’oxygène et de la vapeur d’eau, qui va “climatiser” l’environnement local, initier plus de pluie avec une meilleure régularité en amont et en prime, contribuer à réduire le CO2 de l’air de manière significative. La matière sèche végétale est en moyenne constituée de plus 40-45 % de carbone, qui sont en plus des liens énergétiques pour entretenir et faire prospérer la vie (fertilité biologique).

Il est donc urgent de chercher à intensifier la végétalisation sur les exploitations (Thomas F. et Waligora C., 2023 ; Denise L., 2023).

Nos partenaires

Agribio 04 et Bio de PACA remercient l’ensemble des partenaires investis sur ce projet et dans la réalisation de ces supports :